portraits de clémentine delait, célèbre femme à barbe originaire des vosges

Clementine Delait, la Femme à Barbe Française

Ahhhh les poils !
Qu’on soit homme ou femme, c’est une plaie… un sacerdoce… une croix qu’on porte sur le long chemin de notre vie (qu’est ce que je peux être poétique parfois !).

Sauf quand on s’appelle Clémentine Delait.

Née Clatteaux en mars 1865, la petite Clémentine passe, telle Heïdi, une enfance insouciante dans la montagne vosgiennes puis… c’est la puberté.

En même temps qu’elle voit pousser ses poupoutes, la petite Clem’ voit pousser ses poils… trop de poils… partout des poils…
Ayant sans doute déjà vu faire papa, Clémentine s’achète un rasoir…

A 20 ans, la petite Clatteaux est amoureuse et épouse Joseph Delait, un boulanger pas très regardant sur la peau pas douce de sa douce.

Tout naturellement, Clémentine en vient a vendre le pain dans l’échoppe de son mari et, dans le commerce, la présentation c’est important, alors elle se rase tous les matins… et le commerce prospère.

L’histoire aurait pu s’arrêter là mais c’était sans compter sur les rhumatismes de Joseph qui contraignent le couple à arrêter les baguettes et les miches et à se reconvertir : ce sera un bar.

clementine delait devant le café de la femme à barbe qu'elle ouvrit avec son mari JosephLes années de rasage ayant fait leur oeuvre, les clients finissent par remarquer que Madame Delait a du poil au menton mais loin de s’en offenser, la taulière assume : elle accepte le pari d’un des clients qui lui promet 500 francs si elle se laisse pousser la barbe.

Adieu rasoir : Clémentine se réconcilie avec ses poils et arbore fièrement une barbe fournie qui se dédouble en deux panaches que bien des hommes lui envient.

La classe Clem’ !

Attirée par le bouche-à-oreille, la clientèle afflue dès lors au café des Delait qui est rapidement rebaptisé « Le café de la Femme à Barbe ».

Dame Clémentine – qui en plus d’avoir une barbe, a la bosse du commerce – sent bien qu’il se passe quelque chose et décide de retourner son handicap à son avantage : elle exploite son image et pose pour des cartes postales, des campagnes de publicité et se donne à voir à qui veut.

Et puis c’est la guerre…
Pas question pour Clem’ de continuer à vendre des chopines quand ses compatriotes se battent pour la France : elle s’engage avec la Croix-Rouge.

Vous vous souvenez comment on a surnommé les soldats français de la Première-Guerre-Mondiale ?
Les poilus !
Et devinez qui devint leur mascotte ?

ouverture du petit journal de 1904 illustrant clementine delait la femme à barbe faisant du veloAu lendemain de la guerre, les Delait ouvrent une mercerie à Plombières.
C’est à cette période que Phineas Taylor Barnum, le célèbre directeur du cirque des phénomènes de foire, propose à Clémentine de le rejoindre pour la (modique) somme de trois millions de francs.

Si quelques années plus tôt elle avait accepté un pari à 500 francs, cette fois-ci, Clémentine décline l’offre de Barnum.
C’est que Joseph est malade et Clémentine est maman depuis peu (les Delait ayant adopté une orpheline de guerre)
Et puis on la réclame partout en Europe (Paris, Londres, Dblin…) et notre femme à barbe fait le tour des popotes pour exhiber son impériale pilosité alors pourquoi donc irait elle s’enfermer dans un cirque ?

Devenue veuve en 1928, Clémentine rouvre un bar et met une fois encore ses attributs à profit en montant un spectacle dont elle est la vedette.
Énorme succès !
Tout le monde se presse pour voir « le phénomène »

La renommée de Clémentine est telle que la ville de Vichy organise même en son honneur « le Grand Prix de la Femme à Barbe » dans son grand hippodrome.

pierre tombale de clementine delait portant l'epitaphe ci git la femme à barbe
Exceptionnelle, mais pas immortelle, Clémentine décède le 19 avril 1939 d’une crise cardiaque.

Elle est enterrée dans sa région, au cimetière de Thaon-Les-Vosges et sur sa pierre tombale on peut lire :

« Clémentine Delait,
née Clatteaux,
La Femme à Barbe »


C’est qu’en plus d’un solide caractère et d’une personnalité inébranlable, Clémentine Delait n’était pas dénuée d’humour.

Comme en témoignent ses mémoires, miraculeusement chinée dans une brocante par Roland Marchal, dans lesquelles on peut lire ce dernier clin d’oeil à ce qui fut le poil angulaire de sa vie :

« Mon vieux Saint Pierre, je parie 50 francs qu’il n’y a pas une barbe aussi belle que la mienne dans ton paradis.»

On ne su jamais si elle piqua 50 balles au Grand Gardien…