Vous l’ignorez sans doute, mais depuis 2012, le 11 Novembre ne commémore plus uniquement la fin de la Première-Guerre-mondiale, mais rend hommage à tous les morts pour la France.
C’est que des témoins de la Grande Guerre, il n’en reste plus ; le dernier vétéran de 14-18, Lazare Ponticelli, étant décédé en 2008.
N’empêche que le 11 Novembre est et restera la date de signature de l’armistice de cette foutue guerre et traditionnellement, cette commémoration était célébrée avec des fleurs, mais pas n’importe lesquelles !
. Le Coquelicot pour l’Angleterre et les Pays du Commonwealth
Fin 1914 , les forces militaires se lancent dans la « Course à la mer », une série de combats particulièrement sanglants à travers les Flandres et l’Artois qui marqueront la fin de la guerre de mouvement.
Immobilisés dans leurs tranchées, les soldats observent alors un étrange phénomène : les anciens champs de bataille se couvrent de coquelicots.
Le 3 Mai 1915, le lieutenant-colonel John McCrae, médecin du Corps de santé royal canadien, évoque meme cette macabre coïncidence dans son poeme « In Flanders Fields »
« In Flanders fields the poppies blow Between the crosses, row on row, That mark our place… »
Soit en français :
« Dans les champs de Flandres, les coquelicots oscillent au vent, entre les rangées de croix qui marquent nos tombes… »
C’est que la terre, devenue sablonneuse et gorgée de poussière de chaux, était idéale à la pousse de la frêle fleur rouge.
Depuis, chaque 11 Novembre, renommé « Poppy Day » (poppy = coquelicot) il est de coutume de vendre des coquelicots et de les porter à la boutonnière en souvenir des hommes tombés au front.
La tradition perdure aujourd’hui encore outre-manche bien que les coquelicots soient devenus de papier.
En 2014, pour commémorer le Centenaire de la Grande Guerre, l’Angleterre fit les choses en grand : un flot de coquelicots (en céramique ceux là), du nombre exact de victimes de la Première Guerre Mondiale, fut déversé sur la Tour de Londres comme autant de sang répandu pendant la guerre.
. Le Bleuet en France
Le bleuet a la même particularité que le coquelicot : malgré sa fragilité et sa finesse, il pousse sur des terres meurtries.
D’ailleurs ils n’est pas rare de les voir pousser ensemble…
Pendant la guerre de Tranchées, les jeunes recrues, fraichement envoyées au front dans leur bel uniforme bleu horizon tout neuf, furent surnommées « les Bleuets » par les poilus plus anciens et tout maculés de boue (voire même pour les plus anciens, portantt encore le dramatique pantalon rouge Garance qui les rendaient si visibles !).
Le mot passa rapidement dans le langage courant et on le retrouva dans des cartes postales, des affiches, des chansons ou des poèmes tel que celui d’A.Bourgoin (« Bleuets de France » – 1916):
Les Bleuets couleur des cieux
Ils vont jolis, gais et coquets,
Car ils n’ont pas froid aux yeux.
En avant partez joyeux ;
Partez, amis, au revoir !
Salut à vous, les petits « bleus »,
Petits « bleuets », vous notre espoir ! »
En 1916, Suzanne Lenhardt, infirmière de l’hôpital militaire des Invalides, et Charlotte Malleterre, fille du général Gustave Léon Niox et femme du général Gabriel Malleterre (le genre de nenettes qui s’y connaissent un peu en militaire et tutti quanti !), émues par les souffrances et la solitude des blessés de guerre, décidèrent de créer des ateliers dans lesquels les hommes confectionneraient des « Bleuets de France » aux pétales en tissu et étamines en papier journal.
Ensuite vendus au public en signe de soutien aux troupes, ces petits insignes permirent à ces hommes souvent mutilés, d’avoir une activité et de gagner un petit revenu.
Une sorte de « réinsertion par le travail » si vous voulez, et le soutien aux causes patriotiques, c’est important :
– Le 15 septembre 1920, Louis Fontenaille, président des Mutilés de France, demanda que le « Bleuets de France » soient considérés comme fleur symbole des « Morts pour la France ».
et
– En 1928, le président de la République Gaston Doumergue accorda son haut patronage au «Bleuet de France » ce qui en permit la vente sur tout le territoire.
Bilan : Le 11 novembre 1934, les livres de compte recensent pas moins de 128 000 fleurs vendues.
C’est après la Seconde-Guerre-Mondiale, en particuliers à partir années 60, que le Bleuet de France perdit de sa force jusqu’à quasiment disparaitre.
Pourtant en 2012, un groupe d’officiers de l’École de Guerre et du Cours Supérieur d’Etat-Major (CSEM) décida de relancer la collecte en faveur du Bleuet de France, soutenu par l’Amiral Édouard Guillaud qui encouragea tous les militaires à porter le Bleuet de France à leur boutonnière en mémoire de leurs prédécesseurs.