Pourquoi Ne Faut-il Pas Mettre le Pain à l’Envers ?

photo de miches de pain pour illustrer l'article PCPL sur la superstition du pain retourné, le pain du bourreau

Je ne crois pas vous avoir déjà parlé de ma Grand-Mère.

Pourtant si aujourd’hui on explore de temps en temps le catalogue des expressions populaires françaises, c’est un peu grâce à elle!

C’est que ma grand-mère était poissonnière !
Une VRAIE poissonnière!

Une poissonnière des marchés qui hurle à qui veut l’entendre que « il est bon, il est frais son poisson », qui boit des canons avec ses potes bouchers de l’étal d’à coté et qui cause comme un charretier !

Et si je vous parle de ma Grand-Mère, c’est que ce matin mon fils a posé son morceau de pain à l’envers et que d’un coup j’ai entendu sa voix à l’accent titi parigo à couper au couteau me dire : « dis donc minotte, j’le gagne pas couchée su’l’dos l’pain » !

Du coup j’ai eu envie de vous parler de cette superstition qui veut qu’on ne pose jamais le pain à l’envers !

Pour certains, comme pour ma Grand-Mère, ça signifie qu’il faut respecter le pain parce que si on en a sur la table, c’est qu’on a travaillé dur et honnêtement.
En d’autre termes, qu’on ne s’est pas prostitué pour gagner sa croute… non que la pénibilité du travail des prostituées soit à sous-estimer… mais c’est un autre débat.

La deuxième raison pour laquelle on ne doit pas poser le pain à l’envers, c’est que ça porterait malheur.
On pourra retenir 2 origines majeures à cette superstition :

– la raison religieuse :

Le pain c’est le corps du Christ… Donc le pain à l’envers c’est l’Antéchrist… Fastoche !

Il était de coutume, lorsqu’on retournait le pain par mégarde, de conjurer le malin en dessinant une croix dans la croute avec la pointe de son couteau.

De là découle également une tradition encore pratiquée par quelques anciens, notamment dans le centre et le sud de la France : quand on reçoit des invités, on signe le pain avant de le découper.
Le diable s’étant réfugié dans les quignons, on prend soin de ne pas les donner aux invités.

– la raison historique :

Jusqu’en 1775, le bourreau – personnage noir, mal-aimé associé à la mort et au malheur – bénéficiait du « Droit de Havage », qui lui permettait entre autre privilège, de se servir quotidiennement et gratuitement chez les commerçants dans la limite de ce « qu’une main pouvait prendre ».

Le pain étant la base des repas , l’étal du talmelier (ou talemelier ainsi qu’on appelait le boulanger au Moyen-Age) était un passage obligé et gare au courroux de l’homme à la cagoule s’il n’y avait pas de pain pour lui !

C’est ainsi que, pour être bien certain de ne pas s’attirer les foudres du bourreau, en particulier les jours d’exécution où celui-ci était très occupé et passait tard récupérer son dû, le talmelier mettait un pain de coté et le retournait sur son étal pour bien signifier à sa clientèle qu’il était « réservé ».

Notons enfin que, si par un curieux hasard, l’homme masqué ne passait pas récupérer sa miche, celle-ci n’était pas consommée par le Talmelier (sans doute pour éviter de ce porter la guigne) mais était offerte aux lépreux

 

4 comments

  1. francoise

    j’aime beaucoup vos articles. Bonne continuation

    • PCPL

      Merci bcp Françoise. C’est ce genre de commentaire qui motive à continuer. 🙂

  2. daniel

    grand merci, très agréable à lire… moi-même très curieux de nature :)*

    Bonne continuation 🙂
    Cordialement

  3. Mendasse

    source d’inspiration.